La commission des cartels a voulu clore son mandat en organisant une Matinée des cartels de l’ECF. Éric Zuliani en a proposé le titre : « Le cartel, organe de base de l’École ». Le 2 décembre, six intervenants ont fait part de la place du cartel dans leur formation de psychanalyste. Pour cette occasion, Guy Trobas nous a accompagné en tant qu’extime, ponctuant et concluant les travaux.
J’y ai pour ma part interrogé le terme de base. Le mot apparaît dans la première leçon du Séminaire XI que Lacan tient deux mois après son exclusion de l’IPA. Il y parle d’accueil, de lieu où poursuivre son enseignement : « Tout cela concerne la base, au sens local, voire militaire, de ce mot, la base de mon enseignement » [1] – base depuis laquelle aborder les fondements de la psychanalyse. La base est ici, certes, la base d’opération à partir de laquelle orchestrer la reconquête du champ freudien, mais c’est aussi le fondement d’une structure à venir, l’École, et l’assise où y effectuer un travail.
La même année, Lacan emploie de nouveau le mot de base dans son Acte de fondation, en juin 1964, lorsqu’il parle de « travail de base » [2] à propos du cartel qu’il invente pour l’occasion. Et, seize ans plus tard, lorsqu’il dissout l’École freudienne de Paris et appelle de ses vœux une nouvelle école qui soit une contre-expérience, il évoque une fois de plus la base, en faisant du cartel « l’organe de base » [3] de l’école. L’organon pour les Grecs était l’instrument pour acquérir des connaissances. Organe de base est cette entité modeste et cependant fondamentale dans la formation de l’analyste qui inscrit son désir de savoir dans une école.
Le cartel, organe de base, est voulu par Lacan aux fins d’insuffler une mise au travail, selon une logique où chacun, depuis son désir, se met à la tâche, avec quelques autres, de lire les textes, de se frotter aux concepts et de produire, le cas échéant, un savoir qui, s’il n’est pas toujours inédit, peut être singulier.
Faire du cartel l’organe de base, c’est rappeler les analystes à un retour au travail de base. Le terme souligne la dimension fondamentale d’un tel travail. Cette base est au fondement d’un savoir possible, au plus près du discours analytique, c’est une base depuis laquelle travailler les textes, une assise pour une formation possible du psychanalyste.
Les interventions de la Matinée le démontrent.
Dominique Corpelet
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[1] Lacan J., Le Séminaire, livre XI, Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1973, p. 8.
[2] Lacan J., « Acte de fondation », Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 230.
[3] Lacan J., « Dissolution », Aux confins du Séminaire, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Navarin, 2021, p. 56.