La vie est conjointe à la mort, Eros et Thanatos se nouent dans la dialectique freudienne. Le rapport à la mort ne peut se concevoir sans la dimension du corps vivant et de la jouissance. Freud, dans sa conférence du 16 février 1915, « Nous et la mort », pose l’épineuse question de notre conception de la mort et affirme que nous nous comportons généralement comme si nous voulions l’éliminer de notre vie. La mort est un irreprésentable dans l’inconscient. Pour Lacan, « La mort est un rêve, entre autres rêves qui perpétuent la vie […]. C’est du côté du réveil que se situe la mort.1 » Tenant compte du fait que le langage supplée à l’absence du rapport sexuel et « masque » la mort, chaque parlêtre tente d’inventer un savoir y faire avec la fatalité du non-rapport au fondement de son existence.
Nous rencontrons aujourd’hui une profonde transformation des positions individuelles et collectives à l’égard de la mort. La fin de vie véhicule encore l’idée d’une bonne mort. Les notions de respect et de dignité sont ainsi mises en avant dans le discours courant. La psychanalyse se met quant à elle à l’écoute des sujets qui ont reçu un diagnostic de fin de vie et permet d’y entendre autre chose que des étapes, des stades ou des échelles de souffrance.
La relation à la mort est bouleversée par le discours de la science et celui du capitalisme. Le moment politique actuel s’empare de ces questions et fait le point sur les termes et concepts relatifs à la fin de vie. Une loi est en cours en faveur d’une « aide à mourir » assortie de « conditions strictes ». Comment les débats actuels sur l’euthanasie modifient-ils l’approche de la fin de vie et les interventions en soins palliatifs ? Aux frontières des discours politiques et scientifiques, l’éthique analytique est convoquée au sein de ces pratiques pour mettre à jour le désir au plus près du réel inexorable de la mort.
Le traitement des soins palliatifs offre la possibilité de réaffirmer la dimension du sujet quand la perspective de la mort se profile. Quel regard pose aujourd’hui la psychanalyse sur cette délicate clinique aux confins du discours médical et de l’éthique du sujet ? Des collègues orientés par la psychanalyse lacanienne livrent leurs réflexions.
Françoise Haccoun