Ces 44es Journées étaient comme les premières pour moi !
C’était une première le samedi, d’entendre ces cas de femmes, femmes lues et entendues depuis leur être mère, sans qu’il soit question à aucun moment de faire consister la mère-une, mère-crocodile, que nous avons d’ailleurs symboliquement grignotée dès notre arrivée !
Nul doute que certaines, parmi celles que nous avons rencontrées par la bouche de leur analyste, aient pu être pour leur enfant des mères-ravages, des mères-sauvages… Mais ce qui m’a frappée fut la rigueur extrême observée, il ne fut jamais cédé à l’imaginaire d’un rapport mère enfant qu’il y aurait, sous le nom d’apparence inoffensif de « relation » mère-enfant. Il n’était pas question là de la clinique de l’enfant, ni même à aucun moment de mettre en lien la clinique de l’enfant et celle de la mère : une ligne de séparation a été scientifiquement donnée dès le début dans l’argument établi par Christiane Alberti. Il ne s’agissait pas d’examiner la zone de choc, ni même la zone emboceptrice où le lien mère/enfant trouve à se constituer « entre eux ». Il s’agissait plutôt d’explorer pour chacune l’articulation, ou l’impossible articulation, de la mère et de la femme, plutôt l’examen de cette ligne de partage et de ses conditions d’émergences pour chacune d’elles.
En écoutant les cas samedi, il me sembla donc qu’une ligne avait bougé qui n’écrivait plus la même histoire, voire, qui décompléta radicalement toute possible histoire des mères ; comme si les cas exposés avait été traversés de cette distinction que Lacan établit quand il fait passer la ligne de séparation non plus entre la mère et l’enfant mais entre la mère et le sein : une séparation entre elle-même, entre la mère et la femme, entre la femme et ses objets… Ce n’est pas du tout la même chose que d’examiner la mère depuis les symptômes ou les dires de son enfant.
Enfin, il me semble qu’une place attentive a été calculée au plus juste pour situer au cœur des Journées sans l’évacuer, l’inhumanité qui loge au creux de l’être mère. Le frémissement qui a parcouru vos corps aussi bien que le mien sans doute, avec cette scène où une femme s’apprêtait à noyer son bébé, mais aussi le comique désespéré épinglé dans les saynètes théâtrales du dimanche, ont ménagé une place à cette mère-là, mythique et réelle, comme pour mieux permettre d’axer le projecteur sur les voiles et les montages que chacune trouve pour surmonter ce point d’inhumanité. Ce point, mythique et réel, fondamental, ne dit pas le dernier mot sur les mères. Les 44es Journées en ont apporté la preuve.