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Un, deux, trois, nous irons aux bois – à nous quatre !

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Ce texte est un extrait de l’intervention de Jocelyne Huguet-Manoukian à « Question d’École », le 1er février 2020.

Du déplacement

Pour savoir, il faut se déplacer. C’est le propre du cartel, il faut s’y rendre. Cela n’est pas sans résonnance. Un savoir en cartel est provoqué par un déplacement, qui, en deçà et au-delà de la dimension géographique, est structural. C’est un savoir qui se déplace, il suit la logique circulaire des quatre discours selon laquelle chaque participant se risque de son énonciation dans la rencontre. « Être fait sujet d’un discours peut vous rendre sujet au savoir. »[1] Ce n’est pas une garantie. Il importe de réussir à développer un discours, de lui donner sa consistance pour « n’en sortir qu’à bon escient »[2]. L’effet de savoir est effet de déplacement d’un discours à l’autre.

[…]

Le caractère discursif du cartel est propice à « ce déplacement qu’est le sujet »[3] , « enforme » d’un possible transfert de travail, si tant est que, dans ce mouvement, on se « décrott[e] […] du subjectif »[4].

Du dérangement

Anne Lysy dans une intervention « À propos des cartels »[5] a déjà posé la question du temps logique dans les cartels.

[…]

Il y a dans le cartel un temps limité, un temps fulgurant, il y a aussi une longue durée plus subtile à attraper. Elle résulte du fait que nous arrêtons pour commencer un nouveau cartel. Est-ce que nous commençons à chaque fois ? Je ne le crois pas. Du temps pour comprendre s’installe à notre insu d’un cartel à l’autre.

De « Trois plus-une » au 4

Sur ce point le cartel est affin avec l’expérience de Freud lui-même dans son rapport au savoir. Dès les premières pages de l’histoire du mouvement psychanalytique, il évoque comment l’étiologie sexuelle des névroses n’est en aucune façon une idée née de lui. Elle lui avait été apportée par « trois personnes dont l’opinion pouvait compter sur mon plus profond respect, par Breuer lui-même, par Charcot, et par le gynécologue de notre Université, Chrobak, […]. Chacun de ces trois hommes m’avait transmis une intelligence des choses qu’eux-mêmes, à strictement parler, ne possédaient pas »[6]. Freud dit avoir été paralysé d’étonnement lorsqu’il entendit Charcot s’exclamer face à l’histoire de la maladie d’une jeune femme mariée à un homme impuissant « mais dans des cas pareils, c’est toujours la chose génitale, toujours, toujours, toujours ! »[7] Puissance de la parole qui paralysa Freud d’étonnement. Il venait d’entendre à la lettre ce que Charcot disait à son insu ! Breuer, Charcot, Chrobak et Freud formaient ainsi le premier cartel de l’hystoire de la psychanalyse, Lacan en fut le plus-un.

[1] Lacan J., « Radiophonie », Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 433.

[2] Lacan J., Le Séminaire, livre XX, Encore, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1975, p. 32.

[3] Lacan J., « L’instance de la lettre dans l’inconscient ou la raison depuis Freud », Écrits, Paris, Seuil, 1966, p. 520.

[4] Lacan J., « Proposition du 9 octobre 1967 sur le psychanalyste de l’École », Autres écrits, op. cit., p. 248.

[5] Lysy A., « À propos du cartel », Quarto, n°2, septembre 1981, p. 35-37.

[6] Freud S., Cinq leçons sur la psychanalyse. Suivi de Contribution à l’histoire du mouvement psychanalytique, Paris, Payot, 1973, p. 12.

[7] Ibid., p. 13.

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