Archives des Journées

Une fille et la femme qu’est sa mère

« Être mère – Fantasmes de maternité en psychanalyse ». Le titre de ces 44es Journées de l’ECF a convoqué plus de 3100 personnes. Chacun des inscrits s’est rendu au Palais des Congrès voulant en savoir un petit peu plus de la façon, des façons, dont les analystes d’orientation lacanienne traitent cette question si vaste et si fondamentale. En effet, « l’être mère » recouvre tout un registre qui, d’une façon ou d’une autre, touche au plus intime l’ensemble des parlêtres.

Le soin, l’inventivité et la rigueur avec lesquels cet événement a été préparé par Christiane Alberti et son équipe ont abouti à une véritable performance psychanalytique. Deux jours durant, nous avons assisté à un joyeux feu d’artifice faisant éclater des bouts de gai savoir, des rencontres inédites alliant des disciplines aussi diverses qu’indispensables toutes orientées vers le désir d’attraper « l’être mère » au XXIe siècle.

Du samedi, je retiens tout particulièrement un point issu de la discussion lors de la séquence intitulée « Le programme maternel ». Il s’agit du cas présenté par Chicca Loro. Une femme, ayant échoué à être une « mère parfaite » lui adresse cette plainte : « comment aurais-je pu être une bonne mère alors que la mienne ne m’a pas donné d’amour ». Un classique pourrions-nous dire ! Mais non, rien de tel. Car la psychanalyse nous oriente à opérer en faisant une place pour un au-delà de la demande. La réponse de l’analyste permettra à cette femme d’explorer les plis et les contours non seulement de sa relation à sa mère depuis l’enfance, mais surtout de sa position de jouissance à l’égard de celle-ci. Ainsi, lorsqu’elle en vient aux avatars de sa vie amoureuse, il lui est possible d’entrevoir le lien existant entre son choix de partenaires et la façon dont ils répondent à des points précis, issus très exactement des idées qu’elle se faisait, enfant, quant à l’Autre jouissance de sa propre mère. Son partenaire dans la vie adulte est celui qui lui donne l’occasion de prolonger la position qu’elle a prise vis-à-vis de la femme qu’est sa mère. Le ravage mère-fille fondé donc, non pas sur la demande d’amour d’une fille à sa mère, mais plutôt sur celle qu’une fille adresse à la femme qu’est sa mère.

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Reflections from a Londoner eye on J44

La voulez-vous lire en anglais alors qu’elle nous arrive, elle tombe, direct de Londres ce lundi 24 novembre juste avant le dernier cri des rotatives qui vous envoient ce dixième numéro de l’Hebdo-Blog?

À vous de choisir ! Enjoy !

Although I still cannot quite understand French as it is spoken, and I have to struggle to catch hold of the words, it still seems more valuable to attend these Journées than to stay at home. It is the kind of conference I have always wanted to attend – one that shows a community at work over time, revealing how the theoretical questions not only meet the practice one by one, but also how it informs the way the community organises itself through the various media networks, and again to key aspects of the culture. Last time (Trauma) I was really surprised to see psychoanalysts in conversation with the emergency services, and was very moved by exchange between the two. This time I was thrilled to see the performances of three extracts from the theatre, especially Mrs Klein – the play by Nicholas Wright – which quite by chance I had tickets for the very next week in London. The experience of being amongst the throng of people pressing to get into the auditorium to watch the three theatrical pieces on Sunday afternoon was enlivening and joyous. The whole event encourages me to participate more, to join in.

 

Bien que je ne puisse pas toujours tout à fait comprendre le français tel qu'il est parlé, et si j’ai quelque difficulté à attraper les mots, il semble bien plus précieux pour moi d’assister à ces Journées que de rester à la maison !

Ces Journées incarnent bien le genre de « Conférences », auxquelles j’ai toujours voulu assister, qui montrent une communauté au travail au fil du temps, révélant comment les questions théoriques, non seulement répondent à la pratique du un par un, mais aussi comment elles nous enseignent sur la façon dont les communautés se sont organisées à travers les différents réseaux de médias. La dernière fois (Journées sur le Trauma) j’ai été vraiment surprise d’entendre les psychanalystes en conversation avec les services d'urgence, et j’ai été très touchée par ces échanges.

Cette fois, j’ai été ravie de voir les performances de trois extraits du théâtre, en particulier Mme Klein - la pièce de Nicholas Wright - alors que, tout à fait par hasard j’avais des billets pour la semaine suivante à Londres !

L'expérience d'être parmi la foule de personnes se pressant pour entrer dans l'auditorium pour voir les trois pièces de théâtre le dimanche après-midi a été vivifiante et joyeuse. Le tout m’encourage à participer davantage, à m’y joindre, à cette expérience !

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Nous sommes les bébés du futur

Nos 44es Journées viennent de s'achever sur un air nouveau. On a trouvé ensemble, un par un et une par une, des idées et des approches qui nous ont transformés encore une fois, dans l'ouvrage, dans la joie et dans notre désir envers l'École.

Il fallait pour cette gestation, ce signifiant si beau : ÊTRE MÈRE. Comment aurait-t-il pu en être autrement ? Tout, autour, appelait à la naissance ! Depuis les crocodiles dévorés avec audace comme acte inaugural, les magnifiques séquences de samedi, toutes aussi délicieuses les unes que les autres et si bien orchestrées, jusqu'à ces magnifiques scènes de théâtre du dimanche où Mélanie Klein, mère, nous a bouleversés par sa férocité, Mariana Otero troublés par sa sensibilité envers l'absence et où Christophe Honoré avec son innocence, a réussi même à nous fait rire.

Il faut dire que deux choses m'ont le plus marquée : le rouge à lèvres indélébile de Michèle Elbaz et l'étrange machine à bébés. J'ai vu beaucoup de nos participants s'approcher, avec un air bizarre et méfiant, de cette drôle de machine énigmatique. Les gens paraissaient un peu fascinés et terrifiés. Effet réussi.

Mais finalement, ne pourrions-nous pas dire, dans l'après coup, que ce sont 3100 bébés du futur qui, à la fin de ces Journées, sont nés ? Que la machine à fabriquer des bébés désirants dans chacun de nous n'est autre que la psychanalyse mise à l'épreuve, et en acte ?

Je suis sûre, après avoir entendu les uns et les autres parler et partager encore et encore l'impact produit par ces Journées, et l’effet qu’elles ont fait naître en chacun, que nous sommes tous les nouveaux bébés du futur, que quelque chose de nouveau est né en chacun de nous, et que longue vie aura ainsi la psychanalyse !

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Impression

Au lendemain des Journées de l’École de la Cause freudienne, un mot pour les qualifier, au singulier car elles ont fait événement. Ce mot est « rare ». On ne peut douter que de tels événements soient rares. Il y faut la conjonction d’une autorité qui n’est pas d’hier. Sa puissance s’est manifestée au grand jour, car elle a toujours été décidée à s’émanciper d’aucun pouvoir, sinon celui d’intimider l’adversaire, celui que l’on porte en soi et qu’une analyse a chance de situer et de réduire. C’est sans doute la condition, paradoxale car cette condition est l’inconditionnel tous azimuts, pour que le don entre dans la dimension de l’absolu, faisant interprétation pour chacun de sa capacité à recevoir. On ne s’en sortira pas ou plus par des expédients comme la gratitude, l’admiration brève, ou même toute manifestation de joie qui l’instant passé est déjà déplacée, suspecte. Il n’y a plus d’autre issue que d’y mettre du sien, toute la gomme et sans même savoir si le meilleur l’emportera. On aperçoit qu’à ce prix, une existence prend sa valeur, incommensurable.

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Mille e tre

Ah ! Bientôt fini le poupon rouge au regard noir penché sur les œufs de l’Araignée Maman de Louise Bourgeois. Énigmatique Araignée Maman, tisserande et dévorante.

Ah ! Bientôt fini le blog et tous ces dits, écrits, de toutes ces femmes, mères, fils, maris.

Être mère, quelle question !

Est-ce que j’en sais plus sur « Être mère » ?

Je suis comme elles, émerveillée, inquiète, parfois coupable puis confiante. Encore. Une expérience unique avec chaque enfant.

Avoir une mère. Être mère.

N’oublions pas « Fantasmes de maternité en psychanalyse ».

Allons-y !

Samedi au Palais, la foule. 3060 inscrits ! C’est la fête, des mères et des autres.

Terminés les joyeux et bruyants vagabondages d’une salle à l’autre, les mines défaites des exclus, les salles bondées. Le savoir-faire de nos organisateurs a résolu les problèmes. Merci à eux. Vous choisissez votre thème avant, pas les têtes d’affiche, pas les copains.

Salle 7, la matinée s’ouvre sur un cas clinique très actuel, commenté par Alfredo Zenoni : une femme ravagée par sa mère est enceinte et trouve un appui identificatoire en une amie elle-même enceinte, fille d’une mère aimante. C’est le cas Hélène Deutsch relaté par elle- même.

Je suis un fil. Il n’y a pas d’instinct maternel, l’enfant peut être et demeurer un bout de corps énigmatique. Esthela Solano pose la question « Qu’est-ce qu’un enfant pour une femme ? Il n’y a pas de réponse universelle, elle se déduit de la logique du plus singulier ».

Si l’enfant pour la psychanalyse est l’objet métaphorique de l’objet perdu, la femme dans l’accouchement et la présence de l’enfant, a affaire au réel. Là, dit E. Solano « est mise en jeu la contingence de la rencontre ». Comment une femme va-t-elle faire entrer l’enfant dans les circuits du don, de la demande et du désir ? Pour certaines, c’est impossible.

Maternité forclose, mère comme si, mère toute, mère en puissance, mère folle, mère absente, mère parfaite, mère en furie, mère morte, mère divisée, autant d’avatars de l’« être mère » des parlêtres féminins, autant d’impasses. L’analyste y met du sien, du corps aussi.

Dimanche. Deux formidables introductions de Patricia Bosquin-Caroz et Christiane Alberti sur les déclinaisons de la mère lacanienne. Á lire d’urgence dans les prochaines revues de l’École.

Témoignage des AE : vivacité, intelligence, drôlerie et émotion.

Bouts de film, témoignages de cinéastes : Ah ! Mariana Otero, Honoré et leur mère ! La journée est passionnante. Avec F.Ansermet nous abordons drôlement la science-fiction. On rit jaune. Si la transmission de la vie, c’est la production du nouveau, les nouvelles technologies ne vont-elles pas vers la reproduction du même?

Mères de théâtre cruelles et violentes, toujours coupables.

De formidables Journées ! Merci aux organisateurs attentifs.

Ce que je sais ce soir c’est qu’il y a autant d’« être mère » que de parlêtres mères. Mille e tre et un peu plus.

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3001 rencontres

1001 mères, 3001 rencontres. Voici ce qui m’est venu à la fin de ces 44es Journées de l’École de la Cause freudienne. Je fais le pari que chacun des 3000 et quelques participants a fait au moins une rencontre avec l’un ou l’autre dire qu’il a entendu pendant ces deux jours. Cela m’a frappé plus que jamais, les gens étaient dans les salles plus que dans les couloirs, du début jusqu’à la fin.

Il faut dire que le thème, même s’il a pu paraître au départ une antienne de la psychanalyse, a été exploré de telle sorte par Christiane Alberti et ceux avec qui elle a conçu ces Journées qu’il en est devenu absolument moderne, de plain pied dans le XXIe siècle. Les mères dont on nous a parlé, une par une, sont résolument lacaniennes, autant femmes que mères.

Il y a tellement de choses à dire, mais je dois bien faire quelques choix. Les travaux mis en série dans les salles simultanées avaient été choisis avec soin et pertinence. Un fil, celui du « trou », a pu se tisser par exemple lors d’une simultanée qui concernait le corps sollicité par la maternité. Le « trou dans le corps » s’est ainsi décliné dans les différents textes : qu’il s’agisse du trou réel dans lequel tombe le sujet après avoir recouru à l’IVG, du trou habité par le fantasme au point qu’il devienne une boule pleine qui fait peur, indice d’une jouissance Autre, ou encore du trou vide du pois de Yayoi Kusama, artiste japonaise qui tente d’inscrire la barre subjective par sa pratique artistique opérant un effacement, une « oblitération de soi ». Le gain de savoir était au rendez-vous.

Quand il m’a été demandé d’écrire ces quelques lignes, tout de suite après les Journées, j’ai décidé de prendre des notes. Et je l’ai fait pendant tout un temps le samedi, et aussi une partie du dimanche. Par contre, la plume m’est tombée des mains quand Christophe Honoré a commencé à parler de ses films, des mères de ses films, finement mises en série par Marie-Hélène Brousse et Christiane Alberti : la mère absente à son enfant, la mère selon Bataille, la désinvolte, celle qui s’adresse à la science pour avoir l’enfant impossible, et enfin le lien en même temps si dur et si délicat entre une mère et sa fille. Quelle sensibilité ! Christophe Honoré nous a offert sa division avec une humilité et une authenticité remarquables !

Pour terminer, j’ai trouvé superbe cette phrase conclusive de Mariana Otero : « Je voulais montrer ma mère, et ma mère, c’est une absence. » Sa mère à elle, c’est cette absence. Un bien dire…

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Secret, secrets

Secrets de famille, blancs dans le texte d’un roman familial qui se voudrait parfaitement articulé, interdictions, censure, non dits, blancs, le secret prend des significations diverses pour le sujet, comme cela a été souligné durant la plénière de dimanche. C’est dans ces blancs exactement que l’inconscient vient se loger.

Comment un sujet traite-t-il ce blanc ? Michèle Elbaz, AE, dans son exposé formidable et si drôle, le cerne dans le premier mot d’esprit de sa fille de trois ans quand celle-ci lui parle d’un secret, prononcé « sècreu », sans rien lui dire de plus. « C’est creux » écoute la mère en analyse et elle repère le creux de signification dans l’au-delà du phallus qui relève de la jouissance féminine.

Dans la séquence suivante, Mariana Otero, dans son témoignage si touchant du secret autour de la mort de sa mère, nous parle d’une scène formidable du documentaire qu’elle a fait sur sa mère. Il s’agit d’une pièce de l’appartement où ils habitaient jadis, une pièce vide avec des draps blancs partout. L’artiste pose quelques objets de sa mère également artiste, des objets « pour créer des traces dans le blanc » nous dit-elle, « ma mère est une absence » conclut-elle. Quelle meilleure façon de dire le creux dans le secret ?

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Chambre d’écho

L’Être mère, le devenir mère et les fantasmes s’y rapportant se sont déployés pendant ces J44 sous de nombreuses facettes pour constituer, à l’instar de la belle affiche du prochain Congrès de l’AMP qui nous a été dévoilée par Marcus André Viera, une mosaïque de portraits.

Mais une mosaïque vivante, en mouvement, pleine des éclats, murmures ou cris, venus de ce que Marie-Hélène Brousse a nommé, après Lacan, « la bouche d’or des analysants » au cours de la conversation que Christiane Alberti et elle ont eue, devant nous, avec Christophe Honoré.

Oui, des portraits vivants, même si, de manière très frappante, la mort a été souvent convoquée ; des paroles, propos qui résonneront encore longtemps, invitant à lire, écrire, poursuivre le travail.

Et ces Journées n’étaient-elles pas situées exactement dans l’intervalle entre les J43 sur le trauma et ce prochain Congrès de l’AMP dont le thème est « Le corps parlant » ?

Ainsi, deux interventions sur le thème « Ce corps qui change », introduites par le bel exposé sur La couvade d’Armand Zaloszyck, ont samedi matin particulièrement retenu mon attention. Deux mères, l’une emportée par une maladie grave peu après la naissance de l’analysante dont nous a parlé Véronique Pannetier et l’autre, la belle-mère, la propulsent par moments du côté de l’infini, du « trou noir », mais d’un trou « très dense », « vibrant de plus en plus », trou qu’elle articule à une grande solitude, ou du côté de la colère. Quelle chance d’avoir entendu V. Pannetier déplier délicatement l’avancée et les tournants de la cure de cette femme, interrogeant aussi le statut d’un corps « englué » qu’elle isole comme symptôme protecteur face à sa déréliction de nourrisson et rempart contre un Idéal du moi féroce, sous la figure d’un Janus à deux têtes, ses deux Autres maternels.

Dans la même séquence, Nicole Treglia nous a montré à quel statut d’objet déchet abject l’abondante production picturale, plastique et littéraire de l’artiste japonaise Yayoi Kusama répond, comme seule issue possible, comme impérieuse nécessité pour contrer le pousse au suicide. Car c’est un véritable « anathème » que la mère a jeté à sa fille : « Quand tu étais dans mon ventre, tu étais pourrie et mon ventre était tordu. » N. Treglia a construit son propos à partir du livre de Y. Kusama, Manhattan suicide addict, dont elle nous a dit combien la lecture était difficile. L’art comme solution sinthomatique pour cette artiste de renommée internationale peut s’entendre dans cette formule : être « un pois perdu dans un univers de pois ». C’est certes bien peu de chose, la disparition du sujet n’est pas loin, mais c’est tout de même être un pois situé dans un univers !

L’après-midi, c’est José Rambeau qui a déroulé magistralement pour nous son hypothèse sur les mères infanticides dans la suite de sa rencontre avec l’une d’elles, dont il nous a livré des éléments de témoignage. En réponse à ce qu’elle a pu lui dire, se tenant à une rigoureuse position de secrétaire silencieux dont il a fait valoir la nécessité, il nous a proposé trois types de passages à l’acte dans les cas de mères infanticides : celui qui concerne l’être mère, dans le cas des passages à l’acte suicidaires altruistes, celui qui concerne l’être femme, incarné dans le personnage de Médée, et celui qui concerne la maternité appuyée sur un conjugo qui tient lieu de suppléance. Si le conjoint s’efface, plus rien ne tient, ni être de femme, ni être de mère, tout ne peut que s’effacer, disparaître.

Alors, cette formule que j’ai retenue de la conversation de Catherine Lazarus-Matet avec Brigitte Jaques-Wajeman et François Regnault à propos des personnages de mères des trois pièces dont nous avons pu voir une scène jouée comme au théâtre, « chacune est porteuse d’un drame », ne pourrions-nous l’adopter en la modifiant ainsi : chaque mère est porteuse d’un drame ou d’une tragédie ?

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Dans les creux de la mère

Ces 44es Journées étaient comme les premières pour moi !

C’était une première le samedi, d’entendre ces cas de femmes, femmes lues et entendues depuis leur être mère, sans qu’il soit question à aucun moment de faire consister la mère-une, mère-crocodile, que nous avons d’ailleurs symboliquement grignotée dès notre arrivée !

Nul doute que certaines, parmi celles que nous avons rencontrées par la bouche de leur analyste, aient pu être pour leur enfant des mères-ravages, des mères-sauvages... Mais ce qui m’a frappée fut la rigueur extrême observée, il ne fut jamais cédé à l’imaginaire d’un rapport mère enfant qu’il y aurait, sous le nom d’apparence inoffensif de « relation » mère-enfant. Il n’était pas question là de la clinique de l’enfant, ni même à aucun moment de mettre en lien la clinique de l’enfant et celle de la mère : une ligne de séparation a été scientifiquement donnée dès le début dans l’argument établi par Christiane Alberti. Il ne s’agissait pas d’examiner la zone de choc, ni même la zone emboceptrice où le lien mère/enfant trouve à se constituer « entre eux ». Il s’agissait plutôt d’explorer pour chacune l’articulation, ou l’impossible articulation, de la mère et de la femme, plutôt l’examen de cette ligne de partage et de ses conditions d’émergences pour chacune d’elles.

En écoutant les cas samedi, il me sembla donc qu’une ligne avait bougé qui n’écrivait plus la même histoire, voire, qui décompléta radicalement toute possible histoire des mères ; comme si les cas exposés avait été traversés de cette distinction que Lacan établit quand il fait passer la ligne de séparation non plus entre la mère et l’enfant mais entre la mère et le sein : une séparation entre elle-même, entre la mère et la femme, entre la femme et ses objets… Ce n’est pas du tout la même chose que d’examiner la mère depuis les symptômes ou les dires de son enfant.

Enfin, il me semble qu’une place attentive a été calculée au plus juste pour situer au cœur des Journées sans l’évacuer, l’inhumanité qui loge au creux de l’être mère. Le frémissement qui a parcouru vos corps aussi bien que le mien sans doute, avec cette scène où une femme s’apprêtait à noyer son bébé, mais aussi le comique désespéré épinglé dans les saynètes théâtrales du dimanche, ont ménagé une place à cette mère-là, mythique et réelle, comme pour mieux permettre d’axer le projecteur sur les voiles et les montages que chacune trouve pour surmonter ce point d’inhumanité. Ce point, mythique et réel, fondamental, ne dit pas le dernier mot sur les mères. Les 44es Journées en ont apporté la preuve.

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