« Soirée spéciale vers les J45 »,
mardi 22 septembre à Saint Quentin,
dans le cadre du Séminaire d’étude
Sous le titre : « Emmanuel Carrère d’un couple à l’autre, vers d’autres vies que la sienne », Virginie Leblanc nous a donné sa lecture de l’œuvre. Thomas Roïc nous a présenté le travail de l’artiste Sophie Calle. Les deux exposés se sont croisés, en rendant les liaisons conscientes et inconscientes de l’un à l’autre sensibles et convaincantes.
Formidable soirée et pari tenu par nos collègues lillois, de faire apparaître les « liaisons inconscientes » que peuvent susciter les artistes auprès de leur public et de leurs lecteurs, ainsi que celles qui les animent et qui sont peut-être, on est en droit de le supposer, à l’origine de leur démarche ou de telle ou telle de leurs œuvres. E. Carrère d’abord, et sa fascination féroce pour l’acte horrible qui vient ruiner tout espoir d’humanité, S. Calle ensuite, qui utilise la douleur et l’errance pour des compositions soigneusement mises en scène et orchestrées, chacun nouant à sa façon théâtre, littérature et photographie. V. Leblanc et T. Roïc nous ont fait sentir comment les deux artistes appuient leur travail sur ce qui leur vient de l’Autre, mais aussi du semblable, du passant attrapé comme au hasard, et cependant jamais quelconque, car toujours articulé à leur démon intime.
Ceci n’est pas sans évoquer pour nous ce qui se joue sur cette « Autre scène » où les rêves, les actes manqués, les lapsus, le symptôme dévoilent quelques fragments de l’inquiétante étrangeté qu’est l’inconscient dans le parcours d’une cure, parfois jusqu’à son ressort secret.
C’est avec précision et au travers de citations choisies que V. Leblanc nous emmène bien au-delà de l’analyse littéraire, le long des méandres du processus créateur de plus en plus autobiographique chez E. Carrère. T. Roic nous présente S. Calle avec élégance, et avec le même souci d’exactitude que celui qui anime l’artiste. Il nous fait toucher l’humour et l’angoisse que produisent certaines de ses réalisations, son œuvre ; il nous fait saisir ce qui, dans sa démarche étrange et paradoxalement intrusive, insiste et fuit à la fois.