Introduite et animée par Patricia Bosquin-Caroz, la soirée de la Commission de la Garantie a porté sur le contrôle sur mesure. Dans son introduction à la soirée, la Présidente de l’ECF a rappelé que si Lacan a réintroduit la dimension du désir dans le contrôle en le dé-standardisant et si L’École ne s’occupe pas du choix du contrôleur, la Commission de la Garantie est responsable de donner le titre d’AME (Analyste membre de l’École). Elle le règlemente, le décide et en fixe les conditions, dont celle de la pratique du contrôle. Les interventions et le débat ont témoigné de l’abord logique et inventif de notre orientation. Il apparut que le contrôle et le désir de l’analyste ont partie liée.
Esthela Solano-Suarez a mis l’accent sur les obstacles au traitement de la jouissance qui s’énoncent lors du contrôle et qui se répartissent selon les axes imaginaire, symbolique et réel. Quand l’imaginaire du sens l’emporte, l’analyste est inhibé dans son acte, il éprouve de l’empathie, de la compréhension pour son patient. Des affects l’embarrassent. La débilité mentale se rapporte à cet obstacle imaginaire. L’obstacle symbolique porte l’analyste à élucubrer du savoir, à faire des constructions. Le contrôle va servir à faire la part des choses entre l’élaboration nécessaire du cas et le délire comme élucubration de savoir sans rapport avec les dits du patient. Il va s’agir de prendre appui sur la lettre afin d’opérer un sevrage du sens, d’isoler, par la coupure, un signifiant tout seul qui ex-siste au sens. L’obstacle du réel est celui du corps de l’analyste qui n’est pas supposé jouir. Il peut arriver que les dits d’un analysant produisent des événements de corps chez l’analyste. L’exemple remarquable donné par E. Solano-Suarez est celui d’un analyste expliquant qu’il ne pouvait pas s’empêcher de parler compulsivement à son analysant. Le contrôle a révélé que ce bavardage était une défense de l’analyste vis-à-vis des objets voix et regard incarnés par deux particularités physionomiques assez discrètes de l’analysant : son léger accent et sa paupière tombante. Grâce au contrôle, l’analyste qui se faisait ici symptôme d’un autre corps a démêlé cette embrouille pour la traiter dans sa propre analyse. Dans la partie qui se joue entre débilité et délire, le contrôle du parlêtre permet à l’analyste de se faire dupe du réel hors-sens.
Marie-Hélène Brousse a considéré le contrôle sous l’angle du réveil. Quand l’analyste occupe depuis longtemps cette position, il court le risque de tomber dans la routine ou la monotonie. Il lui faut pourtant se tenir éveillé afin d’accueillir la contingence. Le contrôle réveille l’analyste, il offre une sortie de l’aveuglement par la lecture à l’envers des dits de l’analysant selon une trajectoire complexe. Le contrôle est un dispositif de filtrage. Un message est fabriqué par l’analyste à partir du code donné par la parole de l’analysant. Ce message, adressé au contrôleur qui associe librement, permet d’écouter ce qui n’a jamais été entendu. La référence au séminaire de La lettre volée de Lacan s’impose ici puisque le contrôleur se trouve en position d’être le détenteur d’un message auquel il ajoute une autre écriture. Dans le conte de Poe, la lettre n’est pas vue alors qu’elle crève les yeux. Mais Lacan montre que l’aveuglement à la lettre de l’inconscient est corrélatif d’une position précise dans le dispositif ; c’est cette position que modifie le contrôle en dégageant ce qui reste d’inguérissable et d’inanalysable dans chaque version singulière du « désir de l’analyste », toujours « impur », dit Lacan. À partir de la mise en voix, par l’analyste, de la direction donnée à la cure, le contrôle parvient parfois à toucher au reste symptomatique de jouissance de l’analyste.
Embrouilles cernées, lecture à l’envers, sortie de l’aveuglement, effet de renversement et d’allégement : dans le contrôle sur mesure, c’est le réel qui réveille.