L’amour encore, oui ! L’on pourrait s’y perdre. Qu’est-ce que l’époque montre de particulier dans sa temporalité du nouage entre l’amour, le désir et la jouissance qui implique les trois registres de la topologie lacanienne RSI ? Le discours civilisationnel actuel propose un idéal de vie dans l’abondance prodiguant une multiplicité d’objets de jouissance. Mais l’amour veut de l’Un, l’amour pousse à l’Un. Comment s’associent à présent le pousse-à-jouir vers la satisfaction et l’expérience du manque structurel inhérent à l’amour et au désir ? Le grand amour et l’amour pour la vie sont devenus caduques pour certains. Pour d’autres, ils sont l’aspiration exquise et délicate d’un absolu. Pour d’autres encore, c’est l’expérience de castration – à éviter radicalement !
Les trois textes de ce numéro, signés de Marie-Hélène Brousse, Pamela King et Victoria Paz, approfondissent la question et montrent que la psychanalyse aujourd’hui peut encore nous apprendre du nouveau sur l’amour.
La vie amoureuse est marquée par la modalité de la rencontre. Le hasard de l’étincelle amoureuse est très recherché sur les plateformes. Il existe un top 10 des rencontres sérieuses 2024 pour découvrir et comparer les meilleurs sites. Parfois une rencontre se produit, nous l’entendons de nos analysants dans nos cures. Il y a eu match. Mais dans la plupart des cas, les propositions algorithmées de partenaires ne donnent ni satisfaction ni rencontre. Pour forger leurs profits, les sites de rencontres jouent avec la marge d’erreur structurelle. Car la cause du désir, la « condition d’amour » que Freud appelait Liebesbedingung, est inconsciente. Et puis il n’y a pas d’accommodation possible entre deux pour faire Un. Il y a un impossible. Il n’y a pas de rapport sexuel. Nous, analystes, ne cessons pas de dire que le rapport sexuel ne cesse pas de ne pas s’écrire.
Une psychanalyse permet néanmoins de réaliser que l’amour n’est pas uniquement narcissique ou castration. Il peut encore être jouissance heureuse lorsqu’il fait suppléance au manque du rapport sexuel. La rencontre d’un partenaire peut se faire sous la forme d’un partenaire-symptôme lorsqu’on partage l’objet petit a, même si c’est dans l’exil du non-rapport sexuel. Le coup de foudre n’y échappe pas, bien entendu !
L’imbrication labyrinthique RSI provoque les malentendus de l’amour dans chaque civilisation, laquelle structure le rapport des sexes. Ainsi en débattent nos auteurs dans ce numéro de L’Hebdo-Blog.
Marga Auré