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Le plus sérieux du comique

Par Hélène Bonnaud
11 octobre 2025
Quelques indices

© Gilbert Garcin - La rencontre de Moëbius

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Récemment, lors d’une réunion de travail, j’ai appris que « les jeunes » ne savent plus ce que sont les points de suspension ; ils sont ignorés de la langue sur les réseaux sociaux. Celle-ci étant essentiellement informative, elle n’a rien à faire des points de suspension.

L’espace d’un soupir

Les points de suspension ont pourtant comme effet de suspendre la fin d’une phrase pour la laisser vibrer, ou se poursuivre au-delà du dernier mot, en atténuer la dimension de signification et faire surgir ce qu’en musique on appelle un soupir. Il s’agit d’un signe d’écriture musicale qui indique un temps de silence après la dernière note. Le silence s’écrit aussi avec les points de suspension qui le signifient. Alors, pourquoi ne s’écrivent-ils plus dans la langue des réseaux ? Est-ce là le symptôme d’une disparition de la nuance ? Quelle place fait-on à l’écriture qui ne dit pas, suggère, laisse au lecteur la charge de compléter – ou pas – la signification de la phrase ?

De même, un récent article de Libération1 sur l’intelligence artificielle indiquait qu’elle ne connaît pas la langue de l’inconscient. Elle ne peut faire ni lapsus ni jeux de mots. Elle aussi se réduit à être la plus informative possible. Pas de Witz ni de poésie, et encore moins d’humour.

Conséquence et condition de l’inconscient

Ces deux exemples indiquent en quoi la psychanalyse est irremplaçable. Son inventeur, Freud, a rencontré l’inconscient en s’intéressant à tout ce qui venait faire irruption dans la parole et il y a découvert un monde invraisemblable, mais qui a ses lois et n’est pas de hasard. L’inconscient est « ce trait de l’une-bévue, […] l’Unbewusst, qui veut dire en allemand inconscient. Mais traduit par l’une-bévue, ça veut dire tout autre chose – un achoppement, un trébuchement, un glissement de mot à mot2 ».

Le comique dans la clinique est une conséquence de l’existence de l’inconscient. Il en est même une condition. Les cas cliniques présentés lors des J55 viendront illustrer en quoi le plus sérieux des discours peut, tout à coup, tomber dans la mare joyeuse d’un jeu de mot, d’un lapsus, d’une pensée incongrue qui vient s’infiltrer dans le flux des associations. C’est le sérieux, soit la mise en série, qui accompagne la transmission de la psychanalyse.

Atteindre ce qui, du réel, fait bord

Il sera question de la langue de chaque analysant qui, d’une certaine façon, fait exister la langue analytique. Qu’y a-t-il de comique dans une analyse ? Certes, tout peut y conduire. Le tragique y conduit. L’insupportable peut tout à coup tomber sous le coup d’un lapsus, et produire un rire qui lui-même interprète son auteur. Les ratages de la langue forcent à entendre combien l’inconscient est toujours au bord du trou, prêt à faire chavirer les semblants pour atteindre ce qui, du réel, fait bord. Bon-heurt, écrit Lacan, pour en préciser la mauvaise rencontre. Le rire condense la joie du lapsus, et l’acte manqué celle du désir qui se dévoile. Là où je crois dire, l’inconscient le dit autrement. « La vérité […] est […] sœur de […] jouissance3 », dit encore Lacan, lui donnant ainsi sa véritable portée. Alors, le rire dans une analyse peut prendre différentes modalités : le rire du comique, certes, mais aussi celui du désespoir, ou encore du déni ou du plus jamais ça. Il y a tant de façons de rire, d’en rire, de faire rire, de pleurer de rire, de rire de soi, d’éclater de rire, pendant ou après sa séance… Les 55es Journées vous le diront bien mieux encore.

Hélène Bonnaud


[1]. Daumas C., « Ce qui différencie l’humain de l’IA, c’est ce qui nous échappe, qui n’est pas programmable », Libération, 21 juin 2025, disponible sur libération.fr

[2]. Lacan J., Le Séminaire, livre XXIV, « L’insu que sait de l’une-bévue s’aile à mourre », leçon du 10 mai 1977, Ornicar ?, n°17/18, printemps 1979, p. 18.

[3]. Lacan J., Le Séminaire, livre XVII, L’Envers de la psychanalyse, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1991, p. 76.

Numéro : L'Hebdo-Blog 384
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