Les auteurs publiés dans ce numéro, Bernard Lecoeur, Gérard Wajcman et Isadora Escossia produisent chacun une réponse singulière et originale, à partir du terme d’escabeau. Ce terme, escabeau est avancé par Lacan en 1975 à la suite de son travail effectué sur l’œuvre de Joyce, un escabeau sur lequel se hisser de quelques marches afin de faire de son symptôme et de sa jouissance opaque une œuvre d’art. Lacan l’a concassé en S.K.beau afin d’en détacher le beau et de défaire la signification du mot ; c’est ce travail de destruction de la signification que Joyce a employé. É. Laurent précise que S.K.beau permet de conjoindre « l’Es, le Ça freudien, sous forme de deux lettres hors sens, S.K., et le beau de la gonfle (montée sur escabeau)1. »
Lacan s’est appuyé sur les artistes pour élaborer sa théorie du regard et son rapport de grande proximité avec l’art. En quoi l’artiste fraie-t-il la voie ? Une nouvelle voie à la sublimation proposée par Freud s’ouvre ainsi et permet, en suivant le dernier enseignement de Lacan, l’écriture d’une équation, sublimation = escabeau comme le propose J.-A. Miller. L’œuvre d’art est alors le résultat de la transmutation en objet mis en circulation dans le monde et qui élève le déchet au rang du beau. C’est ce sur quoi se hisse le parlêtre, s’élever lui-même à la dignité de l’objet. Cette inscription (S.K.) est nécessaire à permettre de s’extraire de l’imaginaire et à faire valoir la dimension d’écriture qui supporte un réel.
C’est ainsi que, tournant le dos aux idéaux du beau, du bien, du vrai, l’art de Joyce se met au service de l’eaubscène.
Gérard Wajcman avançait que Lacan envisageait la culture, ou plus précisément la création artistique du côté de ce qui dérange. De ce qui démange. De ce qui tient en éveil et réveille.
Découvrons alors comment des œuvres d’artistes renommés, les tressages de François Rouan, l’urinoir de Marcel Duchamp, et l’usage des miroirs chez Francesca Woodman, ont pu déranger et réveiller le monde de l’art.
Françoise Haccoun et Cécile Favreau
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