« Or toute parole appelle réponse. Nous montrerons qu’il n’est pas de parole sans réponse, même si elle ne rencontre que le silence, pourvu qu’elle ait un auditeur, et que c’est là le cœur de sa fonction dans l’analyse1 ».
Après avoir obtenu mon diplôme de psychologie, d’orientation cognitivo-comportementale en Amérique Latine, je me suis dit « c’est maintenant que commence ma formation ». Ma rencontre avec la psychanalyse ne se fût donc pas fait à l’université, comme la plupart des psychologues.
Cette rencontre a eu lieu dans un groupe d’étude avec des collègues qui s’intéressaient au sujet de la féminité. L’envie d’en savoir plus m’a saisi et j’ai décidé de quitter mon pays d’origine et de venir en France pour me former en psychanalyse.
En France, j’ai commencé mon parcours de formation par un Master de psychanalyse à Paris 8.
Une des premières choses qui m’a frappée en lisant Freud, c’était de comprendre, à travers la théorie, le fait que le corps soit marqué par des mots, le fait qu’il y ait des effets de la parole sur le corps. Ainsi, ce qui faisait souffrir devenait pour moi une affaire entre le langage et le corps.
Certainement guidée par ma propre analyse, mon mémoire de Master 1 s’est centré sur l’étude du concept de pulsion chez Freud et chez Lacan, l’un des quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse. Et pour quoi ?
Pour Freud, la pulsion, Trieb en allemand, est un concept limite entre la psyche et le soma. Cette force constante qu’est la pulsion, a son origine sur les orifices du corps, dont les bords deviennent des zones érogènes. Le but du trajet de la pulsion est d’arriver à diminuer l’excitation de cette zone et de retrouver l’homéostase, ce qui produirait la Befriedigung, la satisfaction. Freud avance dans l’expérience analytique et fait une découverte essentielle : il démontre l’existence d’une compulsion à la répétition qui pousse non pas à la diminution d’une tension mais au silence de celle-ci, ce qui est propre de la pulsion de mort.
Lacan reprend cette question de la satisfaction de la pulsion pour ajouter qu’elle fait partie d’un système où tout s’arrange. Nonobstant, le sujet peut trouver des arrangements qui lui font souffrir. Cette orientation m’a été précieuse pour ce qui est de la place de l’analyste dans la cure analytique. Ainsi, Lacan nous indique que «c’est au niveau de la pulsion que l’état de satisfaction est à rectifier »1.
Travaillant dans un service de psychiatrie, je mesure, grâce à la psychanalyse, à quel point cette offre d’un lieu et d’un espace de parole est l’occasion pour qu’un dire puisse émerger. Un dire sur cette satisfaction douloureuse qui résonne sous forme « d’écho dans le corps du fait qu’il y a un dire »2. Un dire que l’auditeur qu’est l’analyste tente de saisir.
1 Lacan J., Le Séminaire, livre XI, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, Seuil, p. 125.
2 J. Lacan, Le séminaire, Livre XXIII Le sinthome, p. 17